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Comment est fabriqué un fût ?

Une grande partie des rhums qui font notre bonheur sont des rhums vieux. Vieux ? Mais pourquoi sont-ils vieux ? Parce qu’ils ont été vieillis dans des fûts. Ils ont passé plusieurs années au contact du bois et cela les a modifiés. Mais alors d’où viennent ces fûts ? Comment est fabriqué un fût ?

Pourquoi parler de la fabrication d’un fût ?

Vous êtes peut-être passé sur mes vidéos détaillant les étapes de la fabrication d’un fût. Si ce n’est pas le cas, je vous invite à aller regarder la série, elle est très instructive.

J’ai donc été passer une journée à la Tonnellerie Navarre durant l’été 2019. Cela m’a permis de voir toutes les étapes de la fabrication d’un fût et de comprendre un peu mieux d’où viennent les arômes particuliers des rhums vieux.

Le tonnelier est un artisan d’art dont le savoir-faire est étonnant. Il est dur de se dire que c’est un métier qui se perd faute de jeune pour reprendre le flambeau.

Pourquoi fabrique-t-on des fûts en bois ?

La fabrication d’un fût est importante pour avoir un moyen de stockage. Et c’est historiquement pour cela que l’on a inventé le tonneau. Bien plus pratique que les jarres en terre cuites, plus solide. Le fût est un excellent moyen de stockage, idéale pour le transport sur de longue distance et même en mer.

Mais c’est surtout pour donner cette aromatique que seul le bois peut apporter, ce tanin, ces épices. Le tonnelier participe avec son savoir-faire à l’apport de l’aromatique du fût dans le rhum.

C’est essentiellement pour cette dernière raison que le fût est encore aujourd’hui l’un des moyens de stockage les plus utilisés dans les spiritueux. Et je parle bien des eaux-de-vie, car il a tendence à reculer dans l’univers du vin.

Il faut savoir que la technologie permet aujourd’hui d’avoir des moyens de stockage très efficaces et qui ne dégradent aucunement le rhum ou le vin. On peut citer simplement les cuves en inox par exemple qui peuvent être d’une contenance énorme classiquement de 300 à 500 litres, mais pouvant dépasser les 1000 litres.

Les vins, qu’ils soient blanc ou rouge ont moins besoin de développer ce caractère que l’on recherche dans les spiritueux. La maturation d’un vin se fait très bien dans une cuve en inox.

Les maitres de chai et les distilleries continuent à utiliser des fûts en bois pour développer cet aromatique spécifique qu’apporte le bois avec les années de mise en repos. Le rhum communique avec le bois et il y a un échange qui fait passer dans le rhum des arômes épicés et fumés. C’est ce que l’on appel le vieillissement.

L’essence du bois

La première étape de la fabrication d’un fût est le choix de l’essence de bois.

Toutes les étapes ont leur importance dans la fabrication d’un fût, mais celle-ci en a une importante pour le rendu finale et l’apport que le bois aura sur le rhum.

Le choix dépend de la qualité du grain du bois. Il est possible d’utiliser plusieurs types de bois tel que du châtaignier, du peuplier ou du saule, mais il est reconnu que la meilleure essence de bois pour faire des fûts est le chêne.

On distinguera deux grandes origines pour le bois de chêne utilisé dans la fabrication des fûts utilisé dans l’univers du rhum. Le chêne européen avec en particulier le chêne français et le chêne américain qui est plus qu’utilisé dans l’univers du whisky et réutilisé ensuite dans l’univers du rhum.

Découpe des douelles

Le découpage des douelles est particulier.

Tout d’abord dans les bûches. La coupe permet de sortir entre 2 ou 3 douelles selon la taille de la bûche.

Les futures douelles vont être mises à sécher.

Une fois la douelle coupée, il faut la tailler de façon à ce qu’elle puisse bien prendre la forme que l’on veut dans le fût et surtout qu’il n’y ait pas de fuite. Elles sont légèrement creusées pour donner l’arrondi intérieur et la pente des joints doit être minutieuse. La moindre erreur peut entraîner une fuite.

La mise en rose

Une étape qui porte un bien joli nom et qui consiste à disposer les douelles dans le premier cercle du futur tonneau.

Le tonnelier prend avec lui les 20 à 30 douelles dont il va avoir besoin pour faire le fût. Le nombre de douelles dépend de la taille du fût. Dans un équilibre fragile tant que toutes les douelles ne sont pas positionnées, le tonnelier met côte à côte les douelles dans le cercle une par une. À la fin, le côté opposé du cercle prend une forme de fleur épanouie ce qui a donné le nom à cette étape.

Une fois toutes les douelles positionnées, si cela est bien fait, le tonnelier peut retirer le cercle sans que les douelles ne tombent. C’est comme pour les arches en pierre des églises, l’ensemble porte l’ensemble.

Le tonnelier met en suite les cercles de travail pour la suite de la fabrication.

Le cintrage

Cette belle fleure en bois, il faut maintenant la cintrer pour lui donner cette belle forme arrondie.

Cette étape du cintrage dure entre 45 minutes et 1 heure.

Il faut d’abord mettre le fût sur un brasero. Pour cette étape, la chauffe n’est pas excessive. On va en moyenne être autour des 200 degrés. On place alors à la base du tonneau en fleur un câble qui va servir à le cintrer.

On humidifie les douelles pour les attendrir un peu et on laisse chauffer pendant 10 à 15 minutes.

On peut alors faire un premier coup de cintrage. On ne cintre pas totalement, sinon, on risquerait de casser les douelles. Mais, cette étape va tout de même un peu casser les fibres du bois, juste ce qu’il faut pour le rendre un peu plus flexible.

On humidifie une fois de plus le fût et on laisse chauffer durant 20 minutes.

On procède à alors à un deuxième coup de cintrage qui n’est toujours pas définitif.

Avec une troisième étape de chauffe, la barrique est fin près à être complètement cintré sans dommage pour le bois.

On place alors les cercles de travail de l’autre extrémité du fût.

Il est fin près pour passer à la chauffe qui va lui donner toute son identité aromatique.

La chauffe, le bousinage, le toastage

C’est la partie que je préfère. C’est un superbe spectacle est c’est aussi à cette étape qu’une grande partie du savoir-faire du tonnelier est des plus importante.

Il faut savoir donner une bonne température au brasero pour chauffer les douelles, mais sans qu’elle ne brule non plus.

Willy travail cette étape seulement à la vu et au touché. Il ajuste la température du feu et le temps de chauffe pour obtenir la chauffe exacte qu’il souhaite.

En fonction de la puissance et de la durée de la chauffe, celle-ci va rentrer plus ou moins profondément dans le fût. Selon le niveau de chauffe, le fût développera différents arômes qui seront bien entendu communiqués au liquide qu’il contiendra.

La pose des fonds

Notre fût a sa forme, il a obtenu sa chauffe, mais on ne peut pas encore le remplir de liquide puisqu’il n’a pas de fond.

Un fond est une succession de douelles qui ont été fixées ensemble avec des clous et des pailles entre chaque pour garantir l’étanchéité. Une fois composé, le fond est taillé en cercle. Mais il n’est pas taillé n’importe comment.

Le tonnelier aura d’abord taillé dans les deux extrémités du fût le jable. C’est cette fente dans laquelle le fond va s’incérer. Le tonnelier doit en prendre les mesures pour savoir exactement quelle taille il doit donner à son fond. Cette mesure encore une fois doit être très précise pour garantir l’étanchéité du fût.

Avant de poser le fond, on applique dans la rainure une gomme faite à base de farine et d’eau. Cela permet de garantir l’étanchéité.

Une fois le fond taillé, il faut le poser. Pour cela, on enlève les 2 premiers cercles du côté que l’on travaille afin de libérer un peu les douelles. On place le fond à l’intérieur du fût, on le positionne et à l’aide d’une espèce de barre à mine, on le fait s’incérer dans la rainure. On va s’assurer que le fond est parfaitement positionné et on va remettre les cercles pour bien serrer tout cela.

Même opération pour le deuxième fond.

Le cerclage

Jusqu’ici, le tonneau a été travaillé avec des cercles de travail. Ce sont des cercles très robustes, mais qui ne sont pas esthétiques.

On va donc les enlever un par un et les remplacer par les cercles définitifs.

Généralement ce sont des cercles en acier, mais il est possible d’en ajouter en bois pour faire plus rustique.

Le stockage

Le bois est une matière vivante. Il n’est pas possible de le stocker n’importe comment.

Il faut aussi savoir que l’intérêt de la chauffe du bois peut se perdre avec le temps.

Pour éviter cela, les fûts sont enveloppés dans du film plastique avant d’être stocké. Cela va permettre de garder leur taux d’humidité et également leur aromatique.

La restauration d’un fût

On en parle beaucoup moins, mais avec la visite de la tonnellerie Navarre, j’ai pu apprendre beaucoup de choses sur la restauration d’un fût.

Remplacer des douelles

Il est possible avec le temps ou à cause d’un mauvais choc qu’une douelle soit cassée ou simplement percée. Le fût n’est plus alors étanche et il faut remplacer la douelle en question.

Pour cela, on va simplement libérer quelque cercle pour pouvoir extraire la douelle.

Une nouvelle douelle est choisie pour la remplacer, elle est taillée pour être de taille identique à la douelle cassée.

Le fût est alors remonté avec la nouvelle douelle.

Une nouvelle jeunesse pour un fût

Il est possible de donner une nouvelle jeunesse à un fût.

Cela consiste à retirer 2 à 3 millimètres de bois à l’intérieur du fût. Willy dispose d’une machine qui rabote automatiquement un fût sans avoir à le démonter.

Le fût perd en épaisseur, mais il peut à nouveau contenir un liquide sans lui donner un goût de jus de bois.

Le fût ainsi rénové est à nouveau chauffé pour en développer de nouveaux arômes.

Ponçage du fût

C’est purement esthétique, mais avec le temps. Le bois vieilli mal. Il perd de sa couleur. Selon l’humidité du lieu de stockage, il peut y avoir aussi de la moisissure qui s’incruste.

On va donc poncer le fût avec une grosse machine. On enlève une fine couche sur le fût et on lui redonne une belle jeunesse extérieure.

Conclusion

C’est une belle conclusion à cette série sur la fabrication du fût. J’ai hésité à la faire parce qu’elle fait un peu redondante aux autres vidéos détaillant les étapes de fabrication, mais elle va très bien avec cet article.

J’ai appris beaucoup de choses, notamment ce que le fût apporte au rhum. J’ai appris que le savoir-faire du tonnelier est des plus important pour développer le caractère aromatique du fût. Le bousinage a une réelle importance dans le développement de l’aromatique que va donner le fût au rhum.

Maintenant, il va me falloir apprendre ces différences avec mon palais.

J’ai acheté deux fûts de 5 litres à la tonnellerie. Je vais faire un premier test sur une année pour développer l’aromatique d’un rhum qui sera bien entendu un agricole. Je ne vous en dis pas plus.

Et vous ? Avez-vous acquis un fût que ce soit un fût de la tonnellerie Navarre ou d’une autre ? Et qu’avez-vous fait vieillir dans ce fût ?

N’oubliez pas qu’un rhum partagé est un plaisir décuplé.

Mais aussi que l’abus d’alcool est dangereux pour la santé. À consommer avec modération.

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